Pierre Rolinet, survivre pour témoigner

Témoignage – un déporté des camps de la mort raconte son histoire et son chemin de foi. Interview par Sophie Lebrun, journaliste web spécialisée dans la religion et membre du collectif, publié dans La Vie.
Déporté en 1943, ce résistant franc-comtois protestant en est sorti marqué par l’expérience de la mort mais aussi de la solidarité et de la foi vécues dans le camp. Il sera aux Etats généraux du christianisme, à Strasbourg, le 3 octobre.

En arrivant devant la grande porte du camp de concentration de Natzweiler-Struthof, en Alsace, l’odeur du four crématoire qui crachait sa fumée de cadavres m’a pris à la gorge. Dans cette atmosphère lourde, j’ai vu des hommes qui marchaient. J’en ai reconnu certains, résistants comme moi, croisés à la prison de Besançon. Leur visage avait changé, leur corps semblait brisé, ils ne ressemblaient déjà plus à des hommes. Une question m’a assailli : comment transforme-t-on des êtres humains ainsi en si peu de temps ? À 93 ans, ce souvenir de ma déportation est toujours inscrit en moi.

J’étais jeune quand je me suis engagé dans la résistance. À 20 ans, en 1942, après avoir grandi dans une famille protestante d’Allenjoie, en Franche-Comté, j’ai découvert la résistance lors d’un camp d’été de l’Union chrétienne des jeunes gens (UCJG). C’est le pasteur qui nous en a parlé et cela a fait écho à ma vision de la foi : une espérance active. Je ne suis pas du genre à me mettre à genou dans le recueillement et à demander à Dieu de résoudre mes problèmes. La prière, à mes yeux, doit s’accompagner d’une mise en pratique, sinon elle est vide.
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